Racines de la crise

Il m'est très pénible de voir, jour après jour, les événements dramatiques qui se produisent au Nicaragua depuis la mi-avril 2018: environ 340 morts et plus de 2 000 blessés. Une partie de la tristesse que je ressens présentement vient du fait que le Nicaragua est devenu pour moi un deuxième foyer, un peuple avec lequel j'ai tissé des liens très profonds lors de mes séjours annuels depuis 23 ans. Je ressens de la compassion pour les Nicaraguayens qui ont perdu leurs proches, pour les blessés, pour les torturés et emprisonnés, pour les disparus, pour ceux et celles qui vivent dans la peur et se voient parfois obligés de prendre refuge dans un autre pays. Et cette tristesse est d'autant plus grande que j'ai des amis très proches des deux côtés du clan politique: d'une part, parmi ceux et celles qui défendent encore fermement le gouvernement Ortega et, d'autre part, parmi ceux et celles qui ont manifesté massivement et continuent de s'opposer à ce gouvernement. Avoir beaucoup d'ami(e)s des deux côtés me met dans la position d'un enfant dont les parents non seulement se séparent et commencent à se battre ouvertement, mais où un des deux finit par dominer l'autre par la pure force et la violence. Mon espoir est que Nicaraguayens et Nicaraguayennes puissent, dans les prochaines semaines et mois, s'inspirer des valeurs les plus éthiques et révolutionnaires de la révolution sandiniste des années quatre-vingt, afin de surmonter la crise actuelle via un dialogue transparent et honnête, où chaque côté accepte d'écouter en profondeur et dans un esprit de respect la version de l'autre, acceptant de reconnaître ses torts, là où tort il y a, et s'engageant à assurer justice et paix, unique pierre angulaire de tout développement global individuel et social.